Défendre un candidat à l'approche de ce second tour n'est pas une sinécure, c'est pourtant ce que j'ai fait à l'attention de mes camarades socialistes...
Lorsque j'ai choisi François Hollande au début de cette primaire, je n'ai pas caché un certain scepticisme concernant tous les candidats. Celui-ci est toujours présent et je préfère le dire maintenant car si je ne le disais qu'après, il y aurait eu tromperie: ni Aubry ni Hollande, chacun de leur manière, ne sont de ces bêtes politiques capables d'emporter votre conviction par la force du verbe, la fulgurance de leurs démonstrations, par leurs analyses lumineuses, par la portée de leurs perspectives. La tendance est à s'enliser dans les calculs d'apothicaire, à énumérer le souffle court, à justifier son pedigree plutôt qu'à l'illustrer. J'ai évidemment l'impression que l'un s'en sort mieux, mais autant que pour mes amis aubrystes cela me parait plutôt relever de l'autosuggestion.
Par le passé, avec d'autres candidats, je me suis beaucoup "autosuggéré" que tout allait bien, mais je n'ai plus d'appétit pour ça. C'est un vrai problème pour 2012 mais c'est ainsi.
La raison de mon choix est donc d'abord politique, de stratégie électorale et d'assise populaire d'une politique gouvernementale. Mon diagnostic sur le PS, depuis longtemps, est qu'il peine énormément à s'adresser au-delà de son public traditionnel. Voire, il ignore parfois qu'il existe un autre public que son public traditionnel. Ce terrain laissé en friche, ce terrain qui est pourtant un terrain de conquête potentielle est, pour faire vite, cette moitié des français qui travaille dans le secteur privé, marchand, industriel.
Cette ignorance, ou pour nuancer cette vision un peu lointaine, pose un vrai problème. Electoral d'abord: difficile d'être majoritaire sans trouver un écho chez cette moitié là. Gouvernemental ensuite: On ne saurait prétendre redynamiser l'économie sans avoir des relais en son sein, à tout le moins une certaine confiance.
Or, le sentiment est fort qu'au pouvoir, Martine Aubry, bien qu'"ex n°3 d'un groupe" (pendant 2 ans), ferait avec l'économie ce que la droite a fait avec le social: décréter, ne rien négocier. Certains à gauche se diront: "tant mieux". Ils auront tort. Au vu de sa campagne et des débats, ce sentiment parait justifié: La netteté de ses positions, censée asseoir sa candidature, parait devoir être jugée à l'aune de la fermeté ostensible avec laquelle ces positions sont énoncées. Bref, on confond précision et crispation. A fortiori après le sarkozysme, les français ne veulent probablement plus de cette attitude.
Cette "autre moitié" dont je parle, le monde de l'entreprise, demande mieux que des mesures décidées unilatéralement avant même d'être en situation, elle demande mieux que des "solutions concrètes", elle demande un vrai interlocuteur, loyal, soucieux de comprendre, de mettre les mains dans le cambouis sans tomber dans l'ingérence. Il ne s'agit évidemment pas ici de défendre ces PDGs, du CAC40 notamment, qui usent et abusent de l'oreille trop complaisamment prêtée par le pouvoir, à un point de caricature sous sarkozy. Je parle de tous les autres. La droite a organisé son intimité avec les PDGs du CAC40, la gauche doit organiser son intimité avec tous sauf eux. Avec les ouvriers, les employés, les cadres moyens, les entrepreneurs, l'économie réelle.
Ma conviction, et je crois celle de beaucoup de ceux que je croise parmi cette population, est que François Hollande est plus susceptible d'être cet interlocuteur, pour des raisons qui tiennent à sa méthode mais aussi à ses prises de position. Donc plus susceptible de rassembler une majorité de français et plus susceptible de relancer l'activité économique.
On me rétorquera peut-être que je donne trop de poids à l'économie et là encore je crois que c'est une erreur. C'est celui qui convaincra sur ce point qui l'emportera.
"The economy, stupid!" disait Clinton.