Le microcosme a bruissé des affaires Duhamel et Besson, cette semaine, et perpétué une certaine indifférence aux incongruités sarkozyennes. Pourtant, il faut une mémoire de poisson rouge pour ne pas voir que sa campagne actuelle est largement une insulte à l'intelligence, mais on ne va pas se répéter.
Voilà la vraie empreinte de Chirac sur la lecture médiatique des présidentielles: le cynisme est acceptable voire bienvenu, et ce qui est qualifié d'amateurisme est la faute suprême. Dès lors que les couacs à l'ump, ou autres turpitudes d'Elkabbach (son), ne révèlent que des mensonges et des manipulations assumés, il n'y a pas de scoop, et donc rien à dire. Aidons cependant nos médias à se poser des questions, et aussi les sondeurs à en poser à leurs panels:
* On a vu et revu les huées des spectateurs gênés par la visite de Ségolène. De son coté, sarkozy cherche, on le sait, à faire une petite visite calme mais médiatisée en banlieue. on a même appris qu'il avait failli aller à Nanterre et avait annulé au dernier moment. Là-dessus deux remarques: d'une part, ce que craint sarkozy, c'est beaucoup plus que des huées, et les conséquences de sa visite pourraient aller jusqu'à ce que la campagne se fasse dorénavant sur fond d'émeutes. Ce n'est pas rien, mais ça ne vaut pas un éditorial semble-t-il. D'autre part, pourquoi ce renoncement? parce que des RG envoyés par ses soins lui avaient dit que le terrain n'était pas pacifié. Certes sarko est toujours le ministre des RG, mais en l'occurence il sera difficile de soutenir qu'ils ne travaillaient pas pour le candidat. Voilà un détail, connu, qui vaut au moins le même pesant de commentaires que la démission d'Eric Besson. Pour faire bonne mesure, signalons que pendant les affaires, les affaires continuent, comme celle de la non-publication de la vraie note des RG concernant Bruno Rebelle, note qui n'est ni celle qui a "fuité", ni le fait d'automates comme il a été prétendu.
* La tartuferie généralisée ne se cantonne pas à la télé et son Duhamel. Regardons du coté des sondeurs, qui ont récemment commencé à tester Bayrou au second tour. Très bien! dira-t-on. Mais comment se fait-il que le pen ne soit jamais testé au second tour, face à sarkozy par exemple? un 2e tour sarko-lepen ne serait pas le moins probable, et pour une fois les sondages pourraient en intéresser beaucoup qui, à gauche, ne sont pas tout à fait prêts à donner une caution républicaine à 80% à un sarkozy qui ne la mérite pas. Dans le registre qualitatif, quelques autres suggestions de questions à l'usage des instituts: "quel candidat est le plus sincère?", "quel candidat propose la vision la plus cohérente avec son action et ses déclarations passées", "Lequel est le plus susceptible de commettre des abus de pouvoir?", "d'être clanique?", "de vraiment réprésenter tous les francais?". Ou encore "avez-vous trouvé le programme de sarkozy?".
* sarkozy restera au ministère de l'intérieur jusqu'au dépôt des signatures, mais la raison de ce zèle n'intrigue pas grand monde. Une réflexion tout de même: sarkozy a utilisé la menace le pen pour faire se coucher les gaullistes et les chiraquiens. Il se pourrait qu'au final le pen n'aie pas ses signatures. Le busho-berlusconiste donc, tendance minoritaire à droite, pourrait réussir le tour de force de soustraire ces 2 options, celles présentes au second tour en 2002, au choix des français dès le 1er tour! Le comble étant que l'auteur de ce double déni de démocratie plaide l'ouverture et l'esprit démocratique. Pour se convaincre de la frustration, on peut aller voir un blogger gaulliste écrire sur les ralliés vite disparus, sur un sarko "batteleur de foire", une direction ump "archaique", "monolithique" qui se résume à du "marketing", adepte du "parler faux" en disant le contraire de ce qu'ils font depuis des années. Si on ajoute le projet de réactivation du PDS en CDRS, que sarkozy suggère à santini, évidemment pour étouffer l'UDF, on peut mesurer à quel point le lider minimo a l'esprit démocratique. Dans ces conditions, la droite s'honorerait à se ressaisissir, en se tournant vers Bayrou.
On ne blâmera pas outre mesure les médias. D'abord parce qu'il en est qui font leur boulot, on y reviendra, mais surtout parce que le panurgisme manifeste des médias d'en haut prépare les conditions d'un nouveau 29 mai. On a noté dans le canard enchainé de cette semaine que sarkozy était extrêment chatouilleux sur la question: il a "explosé" quand Frank Tapiro et Dominique Ambiel sont apparus dans les dessous de l'émission "J'ai une question à vous poser", car il a perçu le danger. Il pourrait bien recevoir le sparadrap estampillé "candidat des médias" dont il aurait beaucoup de mal à se débarrasser vu l'intimité qu'il entretient avec ces derniers.
Le vote non, sur le fond comme sur la forme, c'est le vote non à sarkozy.