bonne came:
Lors de la république des blogs d’hier, maître Eolas, "maître" incontesté -mais parfois contestable- des affaires de droit au sein de la blogosphère, a invoqué le sénat comme caution démocratique de la Veme république. Il fallait le faire. Et il l’a fait, il faut le dire, avec beaucoup de science et de véhémence, citant, semble-t-il précisément, des amendements issus de la haute assemblée, préservant selon lui les libertés individuelles.
La posture de maître Eolas est semble-t-il d’asseoir son autorité sur une érudition en matière législative qui se veut ostensible. Et avouons-le, l’exposé -méritoire- des joutes sénatoriales peut décontenancer, mais pour des raisons différentes de celle qu'il croit:
* d'abord le côté inattendu de l'exercice, quand la thèse est censée défendre le caractère démocratique de la pratique du pouvoir de sarkozy sous la Veme république.
* ensuite, cette fastidieuse preuve par le contre exemple -et par le petit bout de la lorgnette- forme moins une argumentation qu’une récitation.
Bref, le problème de maître Eolas dans cette affaire est qu’il argumente comme d’autres font lecture de l’annuaire téléphonique, et qu'il exhibe un exemple sans force démonstrative qui le conduit à une position assez acrobatique: selon lui "le sénat est le lieu de la résistance".
Les libertés individuelles sont enterrées par sarkozy, mais, tenez-vous bien, Pasqua prononce l’éloge funèbre !
De quoi se rassurer, mais seulement entre gens de droite...
J’avoue qu’à ce moment, j’ai cru un instant que j’avais affaire à un sarkophobe patenté : employer un terme si connoté que "Résistance" vis-à-vis de sarkozy, en s’appuyant de surcroît sur l’exemple d’authentiques résistants tels que le même Pasqua, cela vous invite à questionner la cohérence de l’ensemble: en gros, "non, nous ne sommes pas en monarchie, car il y a une Résistance". Mais si il y a une "Résistance", c’est bien qu’il y a un problème?
Bref, à l’origine de la controverse, on évoquait l’interpellation de sarkozy par Joffrin lors de sa conférence de presse ("-n’avez-vous pas modifié la constitution sans le dire, pour la remplacer par une monarchie élective?" "-Mais m’sieur Joffrin, les mots ont un sens, monarchie ça veut dire héréditaire…"). Interpellation que l’on pourrait traduire ainsi : si l’on supprimait le parlement, ça ne changerait pas grand-chose. D'où la poussée sénatophile.
J'aurai tout entendu: polémiquer sur le fait de savoir si le Sénat -dont le travail est certes très valable- est une garantie démocratique sous la Ve !
Faire ça à un (ex)-jospiniste qui pensait que décrire le sénat comme "anomalie démocratique" était un quasi-truisme!
De surcroît avec quelqu'un qui passe pour l’éminence bloguistique en la matière!
Une éminence bloguistique se reconnaît en cela que ses pairs blogueurs opinent du chef avant même qu’il n’aie prononcé le premier mot. Un phénomène assez pénible, a fortiori quand des sarkozystes honteux font partie du lot. Les sarkozystes honteux sont pénibles. Et quand ils sont plusieurs, la pénibilité est exponentielle: ils se cautionnent mutuellement de leur autosatisfaction, ce qui les pousse à aller beaucoup plus loin qu’ils n’iraient seuls.
Eolas faisait siens les arguments de sarkozy ("mes prédecesseurs faisaient pareil"), en y ajoutant une condescendance un peu décalée, qui signale un complexe d'infériorité mal refoulé (dont un très pompeux: "il va falloir revoir toute la vie parlementaire de la Ve république"). Je n'ai jamais considéré pour ma part que sur ce point précis institutionnel, Mitterrand était de gauche.
Un autre blogueur, dans l'assistance, assez discret mais dont la niaiserie arrogante est toute sarkozyenne, préférait penser à haute voix que je découvrais l’existence du sénat. Il ne s’est pas rendu compte qu’en ramenant le débat à ce type de provoc, il le perdait tout seul.
Prendre les gens pour des cons est très sarkozyste, bien dans la lignée du coup de "la monarchie ça veut dire héréditaire, m'sieur Joffrin".
Enfin le réputé fréquentable Authueil. Je lui signalais que je n’en étais pas à une première, ayant déjà fait le débat avec Toréador sur le fait de savoir si "choisir un chef plénipotentiaire tous les 5 ans" c'était de la démocratie.
A quoi il me répond "et si c’est efficace !".
J'objecte que celui qui juge de l’efficacité, dans ce système, c'est le chef lui-même.
Réplique : "mais non, ce sont les électeurs, tous les 5 ans."
CQFD.
Cela parait anodin, mais cette dernière conversation comporte une suppression de la République.