Le titre a peu à voir avec ce qui suit, mais je n'ai pas pu résister à pointer cette attirance pathologique du candidat de droite pour le pouvoir et l'argent. La jouissance dans le copinage avec les puissants, l'exhibition avec les millionaires télévisuels estampillés TF1, tout cela conduit immanquablement à l'analogie psychanalytique et excrémentielle.
Il faudrait d'ailleurs que des psys retrouvent ceux qui sont à l'origine du sigle "cac40" pour tenter de savoir s'il n'y a pas du lapsus là-dedans.
Revenons à cet après-débat. Dans les analyses arithmétiques en vue du second tour, deux logiques mènent à deux pronostics différents.
La logique politique et électorale se fondant sur les résultats du premier tour indiquent, au-delà des apparences, que l'affaire est tout à fait jouable pour Ségolène Royal. Le positionnement politique fondé sur la contre-réforme fiscale, sociale, et sociétale est minoritaire dans le pays. Dans le cas de législatives, après les indications du premier tour, le second se présenterait plutôt positivement pour la gauche.
La logique plébiscitaire de ce suffrage présidentiel, dont la France est encore malheureusement affligée, indique au contraire que dans la confrontation des personnes le candidat de droite domine. C'est ce que confirment les sondages à double titre: dans l'absolu puisque depuis 4 mois il y a plus d'une moitié de français qui semblent prêts à l'intrôniser face à Ségolène, mais aussi en relatif puisque les mêmes indiquent qu'il a creusé l'écart avec le débat de mercredi soir.
Dans ce débat, si Ségolène a montré plus de caractère que son adversaire -ce qui correspond probablement à la réalité-, elle n'a pas su lui faire mal dans la rhétorique. Les arguments-cliché de sarkozy sont pourtant connus depuis longtemps, et les contre-arguments aussi. Ces derniers, s'ils sont formulés efficacement, peuvent être dévastateurs (Portelli à Ripostes par exemple). Les occasions pour opérer cette contradiction en présence de l'intéressé sont rarissimes, surtout avec une audience large, et il n'y en a pas eu depuis 5 ans à égalité de temps de parole. Or la contradiction apportée par Ségolène n'a trop souvent été qu'apparente.
Son adversaire, -et ça étonnera peut-être, même sur ce blog-, est un rhéteur médiocre. Un orateur qui a réintroduit le style pompier dans ses discours comme dans le decorum de ses meetings. Il a réhabilité le poujadisme par sa posture: c'est la rusticité de ses thèses qui donne l'apparence de leur robustesse. Il s'est néanmoins sorti conforté de cet exercice imposé.
La difficulté pour la gauche est que sa candidate a les défauts de ses qualités. Elle a opéré un aggiornamento à marche forcée par exemple sur les 35h, la délinquance des jeunes, la crise démocratique. Elle a ré-ancré la gauche dans la réalité, la réalité vécue, le quotidien. Régénéré les modalités d'interaction des responsables politiques avec le peuple. La formule politique qu'elle présente est donc la bonne, mais elle ne maîtrise guère les beaux discours et la rhétorique. D'où le mauvais ajustement de sa répartie face à sarkozy, qui a permis à ce dernier de faire passer plusieurs de ses analyses les plus mystificatrices et de ses mesures les plus irrecevables.
Bref, la France risque de nouveau d'être victime d'un système politique qu'elle chérit mais qui est à bout de souffle, et qui la maintient dans l'immaturité politique, celle de l'archaïque recours à un pouvoir personnifié qui s'occuperait de tout.
A ceux que le prisme déformant de la joute entre candidats laisse encore sceptique, il faut peut-être poser la question en ces termes:
* Est-on prêts à renoncer aux beaux discours et à la rhétorique, ou bien est-on prêts à renoncer à la spécificité politique française en matière de solidarité, de laïcité, de non-alignement?
* Est-on prêts à renoncer au confort du simplisme institutionnel et programmatique, ou bien est-on prêts à renoncer à l'harmonie fiscale, à la modernité sociétale, à une diplomatie multilatérale?
Il y a une cohérence entre le suffrage plébiscitaire et la manière de sarkozy de faire une affaire personnelle des problèmes politiques qui se présentent. Il y a une cohérence entre le style de gouvernance qu'il prône et son ironie sur les "discussions": "Quand on ne sait pas promettre, on promet une discussion. Je veux m'engager sur des résultats, sur du concret" (débat du 2 mai). Monsieur sarkozy compte donc "réformer" sans discuter, manière CPE. Sa technique est annoncée: affaiblissement des syndicats, verrouillage médiatique, flicage des mouvements sociaux, entrave aux manifestants. Il a une forte capacité à mettre les choses en mouvement, dit-on. Le seul mouvement qu'il est susceptible d'imprimer est celui de ses subordonnés, de ses inféodés, de ses obligés, plus largement de ceux qu'il peut y contraindre. Tous les autres, ne nous y trompons pas, n'iront pas dans la même direction, voire seront dans un mouvement frontal.
Dans l'exercice du pouvoir, il faut voir qui bloquera la France et même la démocratie, et qui, au contraire, peut décrisper la politique.
Bayrou aurait dit ça:
"Sarkozy a une vision de la France qu'il considère comme une entreprise. En bon manageur américain, il a promis à ses actionnaires un vaste plan de restructuration pour réduire les coûts plutôt que d'investir dans la R&D et l'innovation pour affronter la mondialisation. En supprimant les postes non productifs (immigrés, assistés, soixante-huitards, jeunes de banlieue, ...), il a su convaincre la base des petits salaires que cette purge conduirait à sauver l'entreprise et garantir leur emploi.
N'ayant plus d'autre choix que ce plan social ou la nationalisation, le comité d'entreprise s'apprête à valider sa vision stratégique. Seulement, les Français vont découvrir que la France n'est pas une entreprise et que le licenciement de ses électeurs est anticonstitutionnel.
On se prépare donc à un blocage pour de longues années. Mon idée était de parier sur la recherche et l'innovation pour relancer la société ; il reste l'espoir que les actionnaires auront la patience d'attendre le prochain rendez-vous pour renouer ce dialogue avec l'ensemble des Français."
PS1: Sarkozy n'est majoritaire que chez les plus de 65 ans. C'est l'occasion d'appeler vos parents et grands-parents.
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PS2: Delors: "La nature est à droite, l'homme est à gauche"
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PS3: Voir les videos et les sons éloquents dans la colonne de droite de ce blog.
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PS4: simonpieri (UMP, ex-FN): "Beaucoup d'électeurs FN ont constaté que Nicolas Sarkozy disait les mêmes choses que Le Pen, mais que lui avait une chance de les mettre un jour en application. Ils ont donc voté utile"
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PS5: "je veux être jugé sur les résultats" dont acte, dès demain. - "il n'y a jamais eu de bavure" compris, Zyed et Bouna? - "je n'ai attaqué aucun de mes concurrents" à part le parti des voyous.- etc etc. Dans cinq ans peut-être, après une insurrection électorale ou autre, il dira comme Chirac: "je ne vous comprends pas"...
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PS6: "je n'étais pas président ni premier ministre". Un défausse qui ne trompe personne. Si les chiraquiens avaient le pouvoir institutionnel, le pouvoir politique incarné par sarkozy était incontournable. Il suffit de demander à Raffarin et Villepin combien de temps ils ont passé à gérer le cas sarkozy. demander aux autres ministres combien de fois ils ont vu sarkozy interférer dans leurs dossiers.
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PS7: En septembre dernier, Bush a compris, au sujet de l'Iran, qu'il était urgent pour lui d'attendre. Il a pris date. Attendez-vous à ce que sur ce sujet les journalistes mondains qui font office de médias commencent rapidement à baisser la garde. Le conditionnement de l'acceptation est rôdé. Quand il s'agit d'une guerre, les journalistes de compagnie, qui agrémentent le paysage en temps de paix, sont dits "embedded".
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PS8: "Il est fondamental que les religions - et notamment la religion catholique - participent aux grands débats de société". "le christianisme a vu naître notre nation".
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PS9: Ne jamais oublier que sarkozy a identifié deux maux dans notre société: l'"intégrisme laïc", pas l'intégrisme tout court, et l'"égalitarisme", pas les inégalités.
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PS10: Ne pas oublier non plus ce précepte journalistique: une altercation avec un fraudeur, ce n'est pas une information. Si elle provoque 6 heures démeutes, c'est une information.
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Ce ne serait, en tous cas et à l'instar de nos amis américains:
PAS EN NOTRE NOM